- HÉMOGLOBINOPATHIES
- HÉMOGLOBINOPATHIESL’hémoglobine normale peut subir des modifications héréditaires. Chez le sujet homozygote, ces mutations permettent seulement la synthèse d’une hémoglobine anormale et il en résulte des troubles cliniques plus ou moins graves. En revanche, chez le sujet hétérozygote, qui porte dans ses hématies un mélange d’hémoglobine normale et d’hémoglobine anormale, l’affection est le plus souvent latente. La maladie observée s’appelle une hémoglobinopathie, pour rendre compte de son origine moléculaire, et l’ensemble des anomalies qui en résultent dans le sang constitue les hémoglobinoses.Ces maladies revêtent une grande importance: d’une part, le nombre des sujets qui en sont atteints est élevé (un individu sur six cents), d’autre part, leur étude permet d’expliquer, à l’échelle moléculaire, la physiologie de l’hémoglobine, et à l’échelle de son gène, les mécanismes de sa production, voire de sa régulation.1. Hémoglobines normales et hémoglobines anormalesToutes les hémoglobines (normales ou anormales) possèdent le même noyau prosthétique (fig. 1). Les différences observées ne portent que sur la partie protéique, la globine.La séparation des hémoglobines est habituellement fondée sur les propriétés de la charge électrique de la globine. Celle-ci, comme toutes les protéines, est un ampholyte; les fonctions acides et bases libres portées par les acides aminés de la protéine sont plus ou moins ionisées selon le pH du milieu. La protéine présente donc une charge globale positive ou négative selon le pH. Placées dans un champ électrique, à un pH donné, les hémoglobines migrent vers l’un des pôles [cf. ÉLECTROPHORÈSE].Hémoglobines normalesL’homme normal possède dans son sang plusieurs variétés d’hémoglobines, formées par quatre chaînes protéiques, identiques deux à deux, et qui établissent entre elles des liaisons très importantes pour le fonctionnement de l’ensemble (fig. 1). Une de ces chaînes, appelée chaîne 見, est présente dans toutes les variétés d’hémoglobine; elle est couplée avec l’une des chaînes: 廓, 塚, 嗀. De ce fait, les hémoglobines normales correspondent à trois types: A1, A2, F (cf. HÉMOTYPOLOGIE, tabl. 5). La figure 3 montre comment on peut les reconnaître par électrophorèse.Toute protéine est constituée par un enchaînement d’acides aminés (appelé séquence) formant la structure primaire de cette chaîne. L’observation des ressemblances et des variations de la séquence des quatre chaînes 見, 廓, 塚 et 嗀, sa comparaison avec la séquence d’une autre protéine héminique, la myoglobine, qui donne aux muscles leur couleur rouge, et la permanence de la chaîne 見 dans toutes les hémoglobines ont permis à V. M. Ingram d’avancer l’hypothèse d’un schéma évolutif au niveau moléculaire: une protéine ancestrale, ressemblant à la myoglobine, aurait donné naissance à la chaîne 見; celle-ci, par de nouvelles modifications, aurait produit la chaîne 塚 et enfin les chaînes 廓 et 嗀.Hémoglobines anormalesSix cents hémoglobines anormales ayant été individualisées, leur nomenclature pose un problème difficile. Les chaînes de globine sont symbolisées par des lettres grecques affectées d’un exposant qui correspond, soit à l’hémoglobine normale, soit à l’hémoglobine anormale. Lorsque la nature de l’anomalie a été précisée, l’exposant indique le rang et le nom de l’acide aminé substitué dans la chaîne atteinte (cf. tableau).Les maladies de l’hémoglobine sont dues à deux types d’anomalies:– Dans le premier cas, celui des thalassémies, la synthèse d’une chaîne tout entière est déficiente, alors que la structure des chaînes produites demeure normale, mais avec anomalie d’assemblage. On peut citer les hémoglobines H, Barts, etc.– Dans d’autres cas, les plus fréquents, la modification a lieu à l’intérieur même d’une chaîne polypeptidique par suite d’une mutation ponctuelle (qui intéresse un seul nucléotide) du patrimoine génétique. Ce remaniement, que l’on trouve par exemple dans les hémoglobines S et M, consiste dans le remplacement d’un acide aminé par un autre. Ce dernier peut posséder une charge électrique différente de celle de l’occupant normal; ainsi une lysine basique peut prendre la place d’un acide glutamique. L’électrophorèse permet alors de détecter la mutation, car la différence de charge retentit sur la migration de la protéine entière.Les travaux de M. F. Perutz, concernant la structure tertiaire de l’hémoglobine, ont montré que certaines hémoglobines ne s’accompagnent de troubles fonctionnels que si la mutation porte sur les acides aminés qui occupent une position clé.Les anomalies de l’hémoglobine se transmettent comme un caractère mendélien autosomique (non lié au sexe). Si le caractère anormal est hérité d’un seul parent, le sujet est hétérozygote pour la tare considérée (phénotype Hb A/Hb S et génotype 見A 廓A/ 見A 廓S par exemple). S’il est hérité des deux parents, le sujet est homozygote (fig. 2) (phénotype Hb S/Hb S, génotype 見2A/ 廓26val). Les individus hétérozygotes pour une anomalie déterminée sont en général en bonne santé: on dit donc que la maladie est récessive. Dans ce cas, l’anomalie reste cependant détectable par des méthodes biologiques (électrophorèse des hémoglobines).2. Les maladies de l’hémoglobineLes hémoglobines anormales sont responsables de maladies dont la cause est génétique et l’explication moléculaire, ce qui a permis à L. Pauling de parler de «maladie moléculaire». Les anomalies observées sont de deux types: quantitatives et qualitatives.Les anomalies quantitatives: thalassémiesCe type d’anomalies est connu depuis longtemps sous le nom d’anémie de Cooley, ou thalassémie, ou anémie méditerranéenne. Cette anémie se rencontre souvent chez les peuples du bassin méditerranéen. En outre, elle peut prendre deux aspects: celui d’une anémie très grave avec hémolyse, hypochromie, globules rouges ayant l’aspect en cible, et anomalies grossières dans le taux des différentes hémoglobines (c’est le cas des sujets homozygotes); ou au contraire celui d’une anémie très modérée , avec peu de troubles (pour un sujet hétérozygote).Cette maladie est due à l’absence ou à l’insuffisance de la synthèse d’un des types de chaînes de l’hémoglobine. On parle de 廓-thalassémie quand la synthèse de la chaîne 廓 est affectée, d’ 見-thalassémie, quand celle de la chaîne 見 est affectée. Ces troubles ont été étudiés grâce aux méthodes de la génétique moléculaire, révélant l’absence de synthèse d’ARN normal: arrêt prématuré (codon stop intempestif) de la synthèse de la chaîne, délétions totales ou partielles du gène, anomalies dans l’excision-épissage, etc.Les size=4廓-thalassémiesLes 廓-thalassémies sont très fréquentes, elles sont dues:– soit à l’absence complète ou presque complète de synthèse de la chaîne 廓 ( 廓0-thalassémie ou thalassémie majeure ); les troubles apparaissent dans la première année de la vie et la maladie est rapidement mortelle; l’électrophorèse montre l’absence de Hb A1, la présence de Hb F, un taux élevé de Hb A2.– soit à la synthèse partielle de chaîne 廓 ( 廓+-thalassémie ou thalassémie mineure ). Les troubles dans ce cas sont bénins; on retrouve un taux élevé de Hb A2 et la persistance de Hb F. Les taux sont variables d’une famille à l’autre, ce qui rend très hétérogène le tableau clinique, hématologique et biochimique.Les size=4見-thalassémiesIl peut s’agir soit du cas homozygote avec absence totale de synthèse de la chaîne 見 ( 見0-thalassémie), mortel au cours de l’évolution in utero ; soit du cas hétérozygote avec déficit partiel de la chaîne 見 ( 見+-thalassémie), assez bien toléré, car le gène normal assure une compensation. Dans ce dernier cas, on trouve un excès de chaînes 廓 et 塚 par rapport à 見. Cela se traduit par la présence, à côté des hémoglobines A1, A2 et F (synthétisées à faible taux), de formes anormales dues à l’association des chaînes normales 廓 et 塚 en excès: Hb H (ou 廓4) et Barts (ou 塚4).Les anomalies qualitatives: hémoglobinosesD’un point de vue médical, on distingue deux grands types d’hémoglobines anormales: certaines sont découvertes chez des sujets qui ne sont pas malades (par exemple au cours d’études systématiques de populations); d’autres provoquent des phénomènes pathologiques plus ou moins graves, par suite d’anomalies physico-chimiques ou fonctionnelles de l’hémoglobine. Seules ces dernières seront décrites ici.Anomalies physico-chimiquesAnomalies de charge électriqueElles sont loin d’être toujours nocives, et on n’insistera que sur la plus fréquente d’entre elles, l’hémoglobine S . Historiquement, sa découverte par L. Pauling et H. Itano a permis de relier pour la première fois une maladie à l’anomalie d’une molécule: c’est le premier et le meilleur exemple des «maladies moléculaires».Médicalement, son importance n’est pas moindre: elle est présente chez les sujets de race noire originaires d’Afrique. À l’état homozygote, elle provoque une anémie hémolytique grave et des accidents viscéraux multiples. La forme particulière des hématies a fait donner à la maladie le nom d’anémie à érythrocytes falciformes (sickle cell anemia ; sickle = faucille) ou drépanocytose. Chez les sujets hétérozygotes, en général cliniquement normaux, on trouve à la fois des hémoglobines A et S reconnaissables par électrophorèse (fig. 3).La lésion biochimique de cette hémoglobine consiste en un changement du sixième acide aminé de la chaîne 廓: un acide glutamique est remplacé par une valine (nomenclature: 見2A 廓26glu size=1轢val). À l’état déshydrogéné, cette hémoglobine anormale devient, quand elle est seule présente dans le globule rouge, très peu soluble et forme un gel qui rend celui-ci peu déformable. Dans le sang veineux où la pression d’oxygène est faible, Hb S est insoluble et précipite. Les globules rouges en faucille devenus rigides forment des amas, expliquant les deux signes majeurs de la maladie : l’hémolyse (les hématies ayant perdu leur souplesse se déchirent) et les accidents viscéraux (les amas d’hématies forment des caillots qui bloquent la circulation locale, d’où des infarctus tissulaires).L’existence d’une tare aussi fréquente pose de nombreux problèmes médicaux ou ethnologiques:– Dans les conditions habituelles, un gène désavantageux s’élimine progressivement; en effet, les homozygotes mutants Hb S/Hb S, par exemple, meurent presque toujours dans l’enfance. Au contraire, en zone fortement impaludée, les homozygotes normaux Hb A/Hb A sont fréquemment victimes de la malaria; les hétérozygotes Hb A/Hb S, qui ne présentent aucune anémie clinique, résistent bien au Plasmodium et ont le maximum de chance de survie. Ce phénomène a donc pu favoriser la multiplication des hétérozygotes, et par suite sélectionner la tare dans les régions où sévit le paludisme.– Si une même tare apparaît dans deux zones géographiquement éloignées, on peut l’expliquer par l’hypothèse d’un déplacement de population à partir d’un foyer d’origine (cas des Noirs des États-Unis, transplantés d’Afrique, et celui, moins clair, de certaines populations de l’Inde).Hémoglobines instablesUn certain nombre d’hémoglobines ont une molécule instable qui ne leur permet qu’une très courte survie dans l’hématie. Dans les globules rouges, on observe des inclusions (corps de Heinz) qui correspondent à l’hémoglobine précipitée in situ. Ces hémoglobines provoquent des anémies hémolytiques à l’état hétérozygote (car les globules rouges sont rendus fragiles par les précipités qu’ils contiennent). Elles ne seraient pas compatibles avec la vie à l’état homozygote. L’instabilité de la molécule peut être mise en évidence in vitro par des tests faisant varier les conditions physico-chimiques de l’environnement (température, pH, présence d’isopropanol, etc.). Ces hémoglobinoses sont dues à des anomalies qui portent sur des acides aminés situés dans la zone de contact entre deux des quatre chaînes de l’hémoglobine. Elles modifient aussi la conformation générale de cette molécule: par exemple, quand un acide aminé de petite taille est remplacé par un acide aminé, occupant dans l’espace un volume supérieur, la cohésion des quatre chaînes (le tétramère) en est affectée et l’hémoglobine devient instable.Anomalies fonctionnellesHémoglobines MLe fer de l’hème existe normalement à l’état ferreux divalent. Il est relié à la globine par des liaisons faibles. Certaines mutations modifient les relations entre l’hème et la globine. Le fer est alors oxydé en fer ferrique trivalent. L’hémoglobine est transformée en méthémoglobine qui n’est pas capable d’assurer la fonction d’oxygénation [cf. FER]. On observe alors une méthémoglobinémie qui se traduit cliniquement par une cyanose qui résiste au traitement des autres méthémoglobinémies (toxiques ou enzymatiques). De telles hémoglobines anormales ne peuvent évidemment exister qu’à l’état hétérozygote (où la présence de 50 p. 100 d’hémoglobine normale assure la survie).Hémoglobines avec affinité modifiée pour l’oxygèneL’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène n’obéit pas à une loi simple. Elle est la résultante d’interactions entre les quatre chaînes (sous-unités) de la protéine. Dans les conditions normales, aux pressions d’oxygène présentes au niveau des poumons, l’hémoglobine se charge en oxygène; au niveau des capillaires, elle se décharge et livre l’oxygène aux tissus (cf. appareil RESPIRATOIRE). Cette propriété est liée aux contacts qui s’exercent entre les chaînes. La mobilité des zones de contact est essentielle au cours de l’oxygénation et de la désoxygénation. Certaines substitutions d’acides aminés portant sur ces zones de contact suppriment l’interaction entre les chaînes. L’affinité de l’hémoglobine pour l’oxygène se modifie de telle sorte qu’elle n’est plus capable de libérer l’oxygène au niveau des tissus. Une telle hémoglobine, fonctionnellement inutilisable, ne peut exister que chez des hétérozygotes.Hémoglobine LeporeL’hémoglobine Lepore (fig. 5) provient d’une fusion de deux chaînes différentes: sa molécule est formée en effet par la réunion de la partie initiale de la chaîne 嗀 et de la partie terminale de la chaîne 廓. Les sujets possédant de l’hémoglobine Lepore présentent un tableau clinique de thalassémie plus ou moins grave.3. Mécanismes génétiques de la production des hémoglobines anormalesCode génétiqueIl est bien établi que la synthèse des protéines est sous la commande des gènes de structure, eux-mêmes faisant partie de l’acide désoxyribonucléique (ADN) du noyau cellulaire, ou génome [cf. GÉNÉTIQUE]. L’ADN est constitué d’une succession de groupements chimiques, des nucléotides, dont les éléments caractéristiques sont quatre bases: adénine (A), guanine (G), cytosine (C) et thymine (T). C’est l’agencement de ces quatre espèces moléculaires en séquences spécifiques qui constitue les gènes.Comme tous les gènes des organismes pluricellulaires (eucaryotes), les gènes de globine comportent, au milieu de la séquence qui code l’information génétique nécessaire à la synthèse de la protéine, des séquences non codantes plus ou moins longues qui l’interrompent, les introns. Il existe deux introns par gène de globine, qui divisent les séquences codantes en trois zones ou exons.Dans un premier temps, le gène dans son entier (exons et introns) est copié (transcription) en acide ribonucléique (ARN) qui lui est complémentaire, et dont les quatre bases sont A, G, C et uracile (U) qui remplace la thymine. Cet ARN précurseur va alors subir un certain nombre de réactions dans le noyau de la cellule, les principales consistant en l’excision des introns suivie de l’épissage des exons, ainsi que l’addition de bases méthylées du côté 5 (cap) et d’une queue de plusieurs bases adénine (poly-A) du côté 3 . On retrouve alors dans le cytoplasme une molécule maturée d’ARN messager (ARNm).C’est cet ARNm cytoplasmique qui va diriger alors la synthèse de la protéine (traduction). Trois bases successives (un triplet) correspondent à un acide aminé. L’ensemble de ces triplets constitue le code génétique [cf. BIOLOGIE MOLÉCULAIRE]. Des signaux spécifiques conditionnent le bon déroulement de la traduction, tels que le codon d’initiation (AUG) et le codon de terminaison (UAA dans la plupart des gènes de globine humaine) qui contrôlent respectivement le début et la fin de l’incorporation des acides aminés dans la chaîne de globine.Mécanisme des mutationsUne mutation est un événement qui se produit dans le gène de structure au niveau du génome et vient en modifier de manière définitive et plus ou moins importante la structure et de là retentit sur la protéine dont il commande la synthèse.Une mutation ponctuelle consiste dans le changement d’une seule des bases d’un gène. Ce sont des mutations de ce type qui sont responsables le plus généralement des hémoglobines anormales . Cette erreur au niveau de l’ADN est transmise au cours de la transcription à l’ARNm, et par suite à la protéine synthétisée: le triplet modifié de l’ARNm correspond à un acide aminé autre que celui qui est normalement inseré dans la protéine. L’exemple de l’hémoglobine S permet de comprendre ce mécanisme (fig. 4).Dans le cas de l’hémoglobine Lepore, le mécanisme est différent: il s’agit d’un crossing-over inégal entre les gènes 嗀 et 廓 dont la structure est assez semblable pour permettre des appariements entre gènes décalés, et qui sont localisés l’un à côté de l’autre sur le même chromosome (fig. 5).On peut observer des cas de doubles hétérozygotes , c’est-à-dire des sujets hétérozygotes pour deux hémoglobines anormales différentes, ayant hérité d’une tare différente de chacun de leurs parents. Ces cas avaient permis de tirer des conclusions génétiques importantes, de nombreuses années avant que la génétique moléculaire moderne n’en apporte la confirmation:– il n’y a aucune liaison génétique entre les gènes des chaînes 見 et 廓 qui sont portés par deux paires de chromosomes différents, tandis que ceux des chaînes 廓 et 嗀 sont étroitement liés sur le même chromosome (fig. 5); il en est de même d’ailleurs pour les gènes de la chaîne 塚;– il existe plus d’un gène pour la chaîne 見, car on a pu observer des sujets doubles hétérozygotes produisant trois types de chaînes 見 (deux chaînes 見 anormales en plus de la chaîne 見 normale);– par contre, les doubles hétérozygotes pour deux hémoglobines anormales dont l’anomalie porte sur la chaîne 廓 ne fabriquent pas du tout d’hémoglobine A normale. Le locus génétique de ces hémoglobines anormales est le même que celui de l’hémoglobine normale; on dit qu’il est allélomorphe, ce qui veut dire que ce locus génétique ne peut former qu’un seul type de chaîne, soit normal, soit porteur d’une anomalie déterminée. Ainsi les individus portant simultanément l’Hb S et l’Hb C ont pour génotype 見2A/ 廓S 廓C.Les lésions moléculaires des thalassémies sont d’élucidation beaucoup plus récente. Il a fallu attendre que l’on sache isoler les gènes par les méthodes du génie génétique dans la fin des années soixante-dix, et que leur séquence ait été établie. Les lésions perturbant ou empêchant l’expression normale du gène, principalement au niveau de ses signaux spécifiques, peuvent bloquer la maturation de l’ARN précurseur en ARNm , et partant empêcher toute synthèse protéique normale. Des mutations ponctuelles ou des pertes de quelques bases (délétions) à la jonction intron-exon empêchent le phénomène d’excision-épissage, donc arrêtent la production d’ARNm mûr et sont responsables de thalassémies 廓0, ou 見0 plus rarement. Par ailleurs, des mutations faisant apparaître une séquence semblable à une jonction intron-exon à un endroit quelconque peuvent tromper le système de maturation. Comme le signal normal est toujours présent, le phénomène d’excision-épissage peut se produire à deux endroits différents: d’une part au site normal, aboutissant à un ARNm mature normal, donc commandant la synthèse d’une protéine normale, mais en quantité réduite, et d’autre part au nouveau site, aboutissant à un ARNm aberrant. Un tel phénomène est responsable des 廓+-thalassémies, entre autres.Un certain nombre de défauts traductionnels ont été décrits dans les thalassémies. Un codon non-sens nouveau, consécutif à une mutation ponctuelle, va interrompre prématurément la synthèse protéique. Cela conduira à un génotype de 廓0-thalassémie; on le rencontre de manière assez fréquente dans les populations méditerranéennes ( 廓0 39, car le nouveau codon non-sens est en position 39 de la chaîne 廓) ou asiatiques ( 廓0 17). Un autre type de mutation consiste en la délétion d’une base, ce qui décale la phase de la lecture du message, et conduit à la synthèse d’une protéine aberrante et à l’absence de chaîne normale.Enfin, des délétions plus ou moins larges des gènes de structure vont empêcher la synthèse de tout ARNm, donc de la chaîne protéique correspondante. De telles disparitions de gènes ont été principalement observées dans les 見0-thalassémies. Cependant, l’existence de plusieurs gènes 見 sur le génome humain rend les phénotypes assez hétérogènes en fonction du nombre de gènes emportés par la délétion. Des délétions spécifiques du gène 廓 responsable de 廓0-thalassémie n’ont été que très rarement montrées. Par contre, des délétions d’une très grande portion de génome englobant les gènes 嗀 et 廓 ont été décrites dans des formes graves dites 嗀0 廓0-thalassémies, pour lesquelles il y a absence totale de synthèse de chaînes adultes et persistance d’une synthèse de chaîne 塚 fœtale ne permettant pas la compensation de la perte de synthèse de chaîne 廓, d’où une anémie grave.
Encyclopédie Universelle. 2012.